Le temps de travail d’un éducateur sportif

Un éducateur sportif peut-il se voir appliquer une convention de forfait en jours ? Quelles sont les conditions ? Quels sont les risques ?

La gestion du temps de travail devient une réelle problèmatique dans le secteur du sport. L’appréciation du temps de travail effectif et l’organisation de ce temps de travail, outre le fait qu’elles sont rendues délicates par un certain nombre de spécificités liées à l’activité sportive, (saisonnalité, conditions climatiques, calendrier des compétitions, aléas, rythmes scolaires, coupures etc …) sont pourtant rarement un sujet prioritaire.

Dans ces conditions, l’organisation du temps de travail et le respect des obligations en la matière (notamment au niveau du contrôle) peuvent rapidement apparaître comme une contrainte purement administrative souvent mal gérée. Il faut dire que notre droit français est sans doute, en matière de durée du travail, l’un des plus compliqué du monde et que les obligations, mêmes pour les petites associations, sont relativement lourdes.

Il n’est donc pas illogique que lorsqu’un dispositif d’organisation du temps de travail présente un intérêt, notamment sur le plan des contraintes de gestion, il soit utilisé parfois de manière un peu large par les employeurs.

Tel est précisément le cas du forfait en jours pour les cadres. Ce système tout à fait atypique d’organisation du temps de travail, prévu par l’article L. 212-15-3 du Code du travail, est réservé principalement aux cadres dits « autonomes » c’est-à-dire aux salariés cadres qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps. Il s’agit d’un régime dérogatoire au principe de la comptabilisation horaire issu des lois AUBRY. Les avantages sont évidents sur le plan pratique : les cadres sont seulement soumis au principe du repos journalier et du repos hebdomadaire. Donc, exit en principe les heures supplémentaires.

Il est à noter que l’accord du salarié, s’il est indispensable, ne suffit pas pour mettre en oeuvre ce dispositif. Il faut qu’il soit rendu possible par une convention collective étendue (c’est le cas de la Convention collective nationale du sport) ou par un accord d’entreprise.

Pour autant, les forfaits en jours doivent être utlisés avec beaucoup de précaution car ils peuvent engendrer des risques non négligeables.

L’arrêt de la Cour de cassation du 31 octobre 2007, dit arrêt « BLUEGREEN » donne un exemple concret de ces risques.

En l’espèce, il s’agissait d’un moniteur de golf, responsable d’enseignement, disposant du statut cadre et qui bénéficiait précisément du régime de la convention de forfait en jours sur l’année par application de l’article L 212-15-3 du code du travail.

Suite à son licenciement (à noter que ce type de demande relative à la durée du travail est formulée la plupart du temps à l’occasion d’un licenciement) le moniteur demande à être indemnisé en vertu de l’article L 212-15-4 du code du travail, puisqu’il ne disposait, en réalité, d’aucune autonomie dans l’organisation de son travail.

On retiendra essentiellement de cet arrêt, plus que la sanction qui aurait pu en découler (rappel d’heures supplémentaires notamment), que le moniteur ne disposait effectivement d’aucune liberté dans l’organisation de son travail et qu’il n’était donc pas susceptible de relever du régime du forfait en jours.

Aussi, les conventions de forfait, qu’ils soient en jours ou en heures, doivent correspondre à une réalité : la qualité de cadre et encore moins de cadre autonome ne s’improvise pas.

A ce titre, ces forfaits ne doivent pas être utilisés immodérément dans le seul but d’éviter l’application d’un certain nombre de règles sur le plan notamment des durées maximales du travail et des heures supplémentaires.

Ces dispositifs de forfaits en jours et en heures ayant été institués dans le cadre de la convention collective nationale du Sport, on ne saurait trop conseiller de les utiliser avec la prudence qui s’impose, d’en respecter notamment le formalisme, faute de quoi, cette situation risque d’appeler d’autres contentieux.