Lutter contre le racisme dans le sport

Entretien avec Patrick KAHN, chargé de mission à la Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme (LICRA) Rhône-Alpes

Entretien avec Patrick KAHN, chargé de mission à la Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme (LICRA) Rhône-Alpes, chargé de mission, rattaché à la fédération Rhône-Alpes et porte parole.

Quelles sont les actions menées actuellement par la LICRA au niveau national et régional ?

Au niveau national, la LICRA assure une veille et une alerte sur des dérives racistes et antisémites notamment sur internet.

Par ailleurs, la LICRA s’occupe de la formation des militants des sections et notamment de la gestion d’une section et de l’aide à la gestion le pilotage des actions.

Sur le plan international, la LICRA est présente dans différentes instances internationales, notamment à l’ONU.

Sur le plan juridique, une commission nationale composée d’une quarantaine d’avocats bénévoles, présidée actuellement par Maître Francis SPZINER, est chargée d’instruire des dossiers, de valider l’engagement des poursuites et d’assister les victimes devant la justice.

Sur le plan de l’éducation, la LICRA a mis en place un dispositif national piloté par la commission éducation pour former aux interventions dans les établissements scolaires.

En outre, la LICRA exerce une mission vis-à-vis de l’histoire, de la mémoire et des droits de l’Homme. Toute action relevant de la mémoire et l’analyse de conflits où les droits de l’Homme ont été ou sont bafoués (Darfour, les génocides des Tutsis du Rwanda, juifs…)

La LICRA possède également une action de nature culturelle par l’organisation d’événements culturels majeurs comme le salon du livre anti-raciste et des actions dans le cadre de différents festivals (Solidays, Avignon, Sens Interdits à Lyon…).

Dans le secteur du sport, la LICRA entretient des relations et des partenariats avec les instances du sport, participe à la gestion de l’observatoire des violences racistes dans le football, et s’occupe de la coordination de la semaine FARE contre le racisme dans le football.

La LICRA joue également le rôle de « Think Tank » ou de laboratoire d’idées. Nous avons créé un groupe de réflexion réunissant des experts sur différents thèmes qui accompagnent par leur réflexion, l’évolution de la LICRA. Nourrir la réflexion de la LICRA et une mission prospective permettant à la LICRA d’anticiper et de concilier sa politique avec les grandes évolutions de la société.

Et sur le plan régional ?

Les actions de la LICRA sont nombreuses en particulier dans le sport amateur et professionnel : la LICRA est membre des commissions de discipline, mène des actions en matière de prévention et de lutte contre le racisme dans le sport en accompagnant notamment les victimes. La LICRA développe également des actions d’insertion par le sport dans les maisons d’arrêt et les quartiers à travers l’équipe de football de la LICRA.

Sur le plan éducatif, la LICRA organise des interventions dans les établissements scolaires, les centres d’action éducative et propose des formations et des accompagnements pour les nouveaux intervenants.

Enfin, la LICRA s’est intéressée particulièrement à la mémoire de Gilbert DRU qui était un résistant et un militant chrétien, mort à l’äge de 24 ans, abattu par la Gestapo place Bellecour à Lyon le 27 juillet 1944.

La Fédération Rhône-Alpes de la LICRA a créé en 1981, à l’initiative de son président René NODOT, le prix Gilbert DRU destiné à récompenser des élèves d’un établissement scolaire du Rhône pour leur action concrète contre le racisme et l’antisémitisme.

Que faites-vous plus précisément dans le milieu du sport ?

Nous menons des actions en direction du sport scolaire (UNSS), mais aussi dans le judo, le basket- ball et le rugby, grâce à des actions en lien avec la sensibilisation et la mise en avant des sports dont les valeurs sont proches de celles de la LICRA.

Quelles sont les situations conflictuelles les plus souvent rencontrées ?

Il s’agit du « racisme ordinaire », des conflits ruraux-quartiers, des actions menées par l’extrême droite, de l’homophobie et plus généralement du sexisme.

Dans quels types de dossiers intervient la LICRA devant les instances du sport et les juridictions ?

La LICRA intervient principalement dans des dossiers de racisme, d’insultes ou d’agressions liées à l’origine ou à l’appartenance ethnique des plaignants. Nous dénombrons aussi quelques dossiers concernant l’homophobie.

Est-ce que les instances du sport se sont saisies des questions de racisme ?

Jusqu’en 2008, pas vraiment. Les instances du sport ont souvent été dans une posture de déni de ces faits, considérant que cela faisait partie du folklore.

Et le sport professionnel ?

L’attitude du sport professionnel sur ce sujet a été parfois exemplaire, parfois décevant. Des campagnes de sensibilisation ont été menées assez tôt avec le sport professionnel. Récemment, tous les clubs professionnels de première et deuxième division, ont signé avec la LICRA une charte de lutte contre le racisme dans le sport professionnel.

Percevez-vous une évolution des comportements et des mentalités ?

Dans le sport professionnel, oui, même si des efforts sont encore à réaliser. Dans le sport amateur, tout dépend des territoires. L’inquiétude reste néanmoins les rencontres entre ruraux et urbains, surtout.

Propos recueillis par Benoît DUMOLLARD