Sanction d’un match perdu : quand le Conseil d’Etat interprète les règlements généraux de la FFF

La sanction d’un match perdu prévu par l’article 171 des règlements généraux de la Fédération française de football (FFF) qui se baserait sur une réclamation postérieure à la rencontre au sens de l’article 187-1 ne peut s’appliquer qu’aux litiges concernant les joueurs et non à un entraîneur présent sur le banc malgré une suspension.

Le 8 janvier 2008, l’Union Sportive de Boulogne Côte d’Opale (USBCO) battait l’Union sportive Avranches Mont-Saint-Michel (USA-MSM) en 32ème de finale de la Coupe de France de football. Seulement, au cours de la rencontre, l’entraîneur de Boulogne était entré sur le terrain pour parler à ses joueurs alors qu’il était sous le coup d’une suspension et d’une interdiction de banc de touche, méconnaissant ainsi l’article 150 des règlements généraux de la FFF. Le club d’Avranches avait alors déposé une réclamation postérieurement au match ; afin de voir infliger au club de Boulogne une sanction de match perdu. L’USA-MSM invoquait, à cet égard, les dispositions de l’article 171 de ce même règlement qui indiquent qu’ « en cas d’infraction à l’une des dispositions prévues aux articles 148 à 170 …, le club fautif a match perdu par pénalité si : … une réclamation a été formulée dans les conditions fixées par les dispositions de l’article 187.1 ».

Dans une décision du 18 janvier 2005, la commission centrale des statuts et règlements de la FFF avait refusé d’annuler les résultats de la rencontre. Puis, le 8 février 2005, la commission supérieure d’appel avait, elle aussi, rejeté la demande de sanction de l’USBCO par un match perdu par pénalité. L’USA-MSM a, par suite, saisi le Tribunal administratif de Caen afin de voir les décisions de la FFF annulées. Mais le Tribunal de première instance rejetait ses prétentions dans un jugement du 4 décembre 2007. Le club a, en conséquence, décidé d’interjeter appel. Et la Cour administrative d’appel de Nantes lui a donné raison le 18 décembre 2008 en annulant les deux décisions. L’instance fédérale a alors porté l’affaire devant le Conseil d’Etat.

Ce dernier, dans un arrêt du 10 juin 2011, annule l’arrêt de la Cour d’appel de Nantes et rejette la requête initiale du club d’Avranches Mont-Saint-Michel. Selon la Haute juridiction administrative, les juges d’appel ont commis une erreur de droit dans l’interprétation des textes applicables. En effet, aux termes du paragraphe 1 de l’article 187, la réclamation prévue ne peut avoir pour objectif que « la mise en cause de la qualification et/ou de la participation exclusivement des joueurs ». Or, pour invoquer l’article 171 cité précédemment et relatif à la sanction de match perdu, il est nécessaire de remplir les conditions précises de l’article 187-1. Pour le Conseil, cet article – qui prévoit des sanctions – est d’interprétation stricte et s’applique donc uniquement aux joueurs. Il ne saurait concerner la situation d’un entraîneur en violation de l’article 150. L’erreur de droit de la Cour d’appel est donc caractérisée. Bien que l’entraîneur suspendu ait été sur le banc de touche et a ainsi méconnu les règlements généraux de la FFF, la sanction adaptée ne peut être la perte du match.

(CE, 10 juin 2011, n° 327158, Fédération française de football)